FRUIT DU BAOBAB BIO, ETUDE DE LA TRANSFORMATION DE LA PULPE DE BAOBAB EN NECTAR
Mots Clés : Adansonia digitata L. ; baobab ; composition ; nectar ; jus de fruit ; pain de singe.
1. RESUME
Le fruit du baobab (Adansonia digitata L.) ou pain de singe, est traditionnellement consommé dans de nombreux pays d’Afrique. Une enquête de terrain (Sénégal) a montré que la pulpe du fruit est principalement utilisée pour l’élaboration de boissons de type nectar. Elles ne sont jamais stabilisées. La caractérisation biochimique de la pulpe révèle une faible teneur en eau (6 %), une forte acidité titrable (70 meq/100g) et une teneur élevée en acide ascorbique (jusqu’à 312 mg/100g). L’analyse de 4 échantillons provenant de zones géographiques différentes montre que la composition varie peu sauf pour l’acidité et la teneur en acide ascorbique, mais elle subit une certaine variation au cours du temps. L’étude de la transformation de la pulpe en nectar et de sa stabilisation par une pasteurisation thermique classique, met en évidence une amélioration de la durée de conservation du produit qui reste encore très insuffisante. La flaveur et la couleur du nectar sont affectées par ce traitement et aussi par une stabilisation à froid par microfiltration tangentielle.
2. INTRODUCTION
Le baobab, Adansonia digitata L. est un arbre très ancien qui peut atteindre plus de 1000 ans. Il appartient à la famille des Bombacacées. Il est originaire d’Afrique tropicale où il est caractéristique du paysage des steppes sahéliennes et savanes soudano-sahéliennes. C’est un arbre de 20 à 30 m de haut ayant 3 à 9 m de diamètre. Le fruit ovoïde, appelé pain de singe, contient des graines noires enrobées d’une pulpe crayeuse blanche.
Les chiffres officiels mentionnent une production de plus de 3200 t/an de pain de singe au Sénégal (Institut Sénégalais de Recherche Agronomique/ Direction des eaux, forêts, chasse et conservation des sols). La pulpe du fruit est largement consommée de façon traditionnelle sous différentes formes. Elle entre notamment dans la formulation de préparations céréalières et de boissons.
Cette étude s’inscrit dans le contexte du développement de la valorisation des produits locaux au Sénégal. Les objectifs étaient de mieux caractériser le fruit et d’évaluer son potentiel pour une transformation en nectar à plus grande échelle. Un premier travail par voie d’enquête a été réalisé afin d’identifier les principales utilisations locales de la pulpe de pain de singe et de caractériser les procédés traditionnels de transformation. Sur plusieurs échantillons de diverses provenances, la composition de la pulpe a été déterminée afin d’évaluer sa variabilité. Enfin, une première approche de la transformation de la pulpe en nectar est proposée. La stabilisation de la boisson par pasteurisation classique et par microfiltration tangentielle y est évaluée.
3. MATERIEL ET METHODES
3.1.Matières premières
Quatre échantillons de fruit ont été choisis en fonction de leur provenance : 2 provenant de l’Est (Balla et Kédougou), un venant du Sud (Kolda) et le dernier de l’Ouest (Thiès).
A l’achat, les fruits étaient débarrassés de leur coque et conservés à température ambiante dans des sacs en fibres synthétiques. Avant analyse, la pulpe qui représente 16 à 28 % de la masse du fruit décoqué, est séparée des graines (67-72 %) et des fibres (4-13 %) par pilage au mortier et tamisage (mailles 0,4 mm ).
3.2. Méthodes
Afin d’identifier les différentes utilisations et de définir les procédés de transformation traditionnels du fruit, une enquête ouverte a été réalisée sur un échantillon de 87 personnes (ménagères, restaurants, marchés) en zone urbaine (Dakar) et à Saly (80 km au sud de Dakar).
Les caractéristiques biochimiques des produits ont été déterminées à l’aide des méthodes suivantes : humidité (dessiccation 103 °C), extrait sec soluble (réfractométrie), cendres (incinération 525 °C), matières grasses (Soxhlet/hexane), protéines (Kjeldahl/6,25), vitamine C (rédox 2-6DCPIP), sucres et amidon (Luff-Schoorl), acidité titrable (titrimétrie NaOH). Diverses analyses microbiologiques ont été réalisées (dénombrements) : flore mésophile aérobie totale, levures et moisissures, bactéries lactiques, coliformes totaux. Une évaluation de la qualité sensorielle des nectars, a été effectuée.
La pasteurisation du nectar a été réalisée dans un bain-marie à 70-80 °C après conditionnement en bouteilles verre de 250 mL. La stabilisation à froid du nectar par microfiltration tangentielle a été effectuée sur un pilote IMECA muni d’une membrane tubulaire en céramique de diamètre moyen de pores 0,2 µm. Les conditions opératoires sont les suivantes : pression transmembranaire de 1,0 à 2,9 bar, vitesse tangentielle de 2 m/s, température ambiante.
4. RESULTATS ET DISCUSSION
4.1.Résultats de l’enquête
L’enquête a révélé que toutes les parties du baobab sont utilisées : pulpe, graines, coque du fruits, feuilles, écorce, racines et même la sève de la plante. La pulpe du fruit est la matière première qui est la plus largement valorisée. Parmi les 5 principales utilisations traditionnelles recensées (Figure 1), les boissons de type jus de fruit sont les plus couramment consommées. Le « ngalakh » arrive en seconde position. Ce mélange liquide sucré à base de pâte d’arachide, de pulpe de pain de singe et de farine de mil roulée cuite, est surtout préparé à l’occasion de fêtes religieuses. Enfin, la pulpe est également utilisée comme acidifiant dans la cuisine traditionnelle.
L’enquête a également permis de caractériser les procédés traditionnels d’élaboration du jus de fruit qui correspond en fait à un nectar. Le schéma technologique suivi est assez constant (Figure 2). Quelques variantes ont cependant été relevées principalement lors des opérations de lavage (nombre de lavages, température de l’eau), d’extraction (durée du trempage et du malaxage, ratio eau/pulpe utilisé) et de formulation (quantité de sucre, aromatisation).
Figure 1. Principales utilisations alimentaires traditionnelles de la pulpe de fruit au Sénégal et fréquences de citation dans la population interrogée.
Ng = Ngalakh ; Uti = Utilisations culinaires diverses ; Sa = Sauces ; Co = Compléments alimentaires.
Ces boissons ne sont jamais stabilisées. Elles peuvent être conservées à l’état réfrigéré pendant quelques jours. A la suite de cette étude, un procédé standard de transformation de la pulpe en nectar a été défini. Dans ces conditions la boisson obtenue présente un extrait sec soluble d’environ 17 g/100g, un pH de 3,3 et une acidité titrable de 4 meq/100mL.
4.2.Caractérisation biochimique de la pulpe
Les principaux résultats obtenus sont présentés dans le Tableau 1. Certaines caractéristiques sont remarquablement constantes quelque soit la provenance de l’échantillon. La teneur en eau de la pulpe est très basse (6-7 %). Elle est un peu plus élevée pour l’échantillon n° 3 (7,5 %) qui provient d’une zone plus humide.
Ces valeurs sont comparables à celle trouvée par Nour et al. (1980) [7], mais faibles par rapport au 9,7 % annoncé par Ferre (1939) [8]. Compte tenu de la faible humidité de la pulpe, la teneur en glucides est très élevée. On y trouve, en accord avec [9] plus de 40 % d’amidon. Les sucres réducteurs sont par contre peu représentés (4 %) alors que Nour et al. (1980) [7] avaient obtenu 19 %. Cet écart considérable peut être lié à la matière première ou au différentes méthodes d‘analyse utilisées. La teneur en minéraux est très élevée pour un fruit (5 %). Celle en matière grasse oscille entre 0,5 et 0,8 % ce qui correspond aux résultats obtenus par Ferre (1939) [8] mais est plus élevé que les teneurs présentées par Nour et al. (1980) [7] (0,2 %). En accord avec Nour et al. (1980) [7], la pulpe contient environ 2 % de protéines.
Pour tous les échantillons, l’acidité titrable de la pulpe est très élevée. Elle contient également une quantité importante de vitamine C. Notons que, par rapport aux autres caractéristiques, une plus grande variabilité de composition est mise en évidence. L’échantillon n° 3 provenant de Kolda est deux fois moins acide (35 meq/100g) que les autres (73 meq/100g en moyenne). Il contient également environ 2 fois moins de vitamine C (126 au lieu de 239 mg/100 en moyenne). L’incidence des conditions pédoclimatiques, du stade de maturité du fruit à la récolte et des conditions de stockage de la pulpe, sont autant de facteurs qui peuvent expliquer ces variations.
Fruit décoqué
100 kg
Tri Lavage
0 – 3 lavages eau
30 ou 100 °C [30]
Trempage
5 – 480 min [100]
30 °C
Malaxage
5 – 15 min [7]
30 °C, manuel
Tamisage
0,4 – 0,5 mm [0,5]
30 °C
Eau
100 – 500 L [265]
Nectar
150 – 600 L [230]
Sucre
50 – 125 kg [68]
Autres
Lait, extrait vanille, jus de fruit
Conditionnement
Bouteilles plastique
Stockage
1 – 7 j [2]
4 °C
Formulation
Graines/fibres
4.3.Evolution de la composition de la pulpe au cours du stockage
Afin d’évaluer la stabilité de la pulpe et l’incidence du stockage sur sa qualité, l’évolution de sa composition au cours d’un stockage à température ambiante (30 °C) a été suivie pendant 35 j (conditionnement en poches plastique non-étanches). La teneur en eau de la pulpe augmente significativement pendant le stockage (+80% en 1 mois). Le caractère hygroscopique de la pulpe est donc mis en évidence. Durant le stockage, la teneur an vitamine C passe de 126 à 94 mg/100g (base sèche). Cette diminution résulte probablement d’une dégradation oxydative de l’acide ascorbique. Une augmentation de l’acidité titrable de la pulpe est également notée (+50 % après 35 j). Ces évolutions pourraient être d’origine biochimique. Compte tenu de la faible teneur en eau du produit, il est peu probable qu’elles soient liées à un développement microbien. Nous avons également constaté une évolution de la couleur de la pulpe : elle fonce pendant le stockage.
Ces résultats montrent que d’importantes modifications de composition peuvent intervenir pendant le stockage. Pour limiter la reprise en eau et les phénomènes oxydatifs, l’utilisation d’emballages étanches et opaques doit être envisagée.
4.4 Transformation de la pulpe en nectar
4.4.1 Préparation du nectar
Le nectar a été préparé en se basant sur la procédure présentée sur la Figure 2. La séparation de la pulpe des graines et des fibres est réalisée par trempage, puis tamisage (1kg de pulpe dans 3L d’eau). En effet, la séparation de la pulpe des graines et des fibres peut être aisément obtenue en associant un trempage à froid de 30 min, à un malaxage de 4 min.
Tableau 1. Principales caractéristiques biochimiques de la pulpe pour 100g de matière sèche.
Echan- tillons |
Humidité* (g) |
Amidon (g) |
Sucres réduc. (g) |
Acidité titrable (meq) |
Cendres (g) |
Matières grasses (g) |
Proté- ines (g) |
Vit. C (mg) |
N°1 Balla |
6,3 |
41,4 |
3,8 |
77,3 |
6,3 |
0,5 |
2,6 |
195 |
N°2 Kédougou |
6,6 |
42,3 |
3,9 |
69,0 |
5,2 |
0,8 |
2,1 |
209 |
N°3 Kolda |
7,5 |
– |
– |
35,0 |
4,3 |
0,5 |
1,8 |
126 |
N°4 Thiès |
6,2 |
42,1 |
3,6 |
73,1 |
4,7 |
0,7 |
2,3 |
312 |
* pour 100g de matière fraîche.
Pour les essais, la quantité de sucre ajouté lors de l’étape de formulation a été fixée à 47 kg pour 100 kg de fruit afin d’obtenir un nectar final à 13 % d’extrait sec soluble. Cette boisson présente un pH de 3,3, une acidité titrable de 3,8 meq/100mL, des teneurs en matière sèche totale, vitamine C, cendres et protéines respectivement de 14,6 g/100g, 13 mg/100g, 0,17 g/100g et 0,15 g/100g. Elle ne se conserve que 4 j à 4 °C car au-delà, des modifications significatives de couleur et de flaveur sont détectées.
4.4.2 Pasteurisation
Les résultats des analyses microbiologiques sont présentés dans le Tableau 2. La pulpe du fruit est peu contaminée avec une flore aérobie totale de l’ordre de 4 103 ufc/g. En terme microbiologique, l’efficacité du traitement thermique utilisé semble démontrée et le produit obtenu est conforme aux normes en vigueur pour les nectars pasteurisés. La composition du nectar est peu modifiée par la pasteurisation bien qu’une perte de 10 % soit notée pour la vitamine C. En revanche, les tests sensoriels montrent que l’arôme et la couleur du nectar sont significativement affectés par le traitement. En complément de cette étude, des tests de conservation ont été réalisés. Malgré les bons résultats des analyses microbiologiques, des modifications de flaveur du nectar pasteurisé ont été détectées après 11 j de stockage à 4 °C.
Tableau 2. Résultats des analyses microbiologiques
Analyses |
Pulpe (ufc/g) |
Nectar frais (ucf/mL) |
Nectar pasteurisé (ucf/mL) |
FMAT |
3,7.103 |
5,6.105 |
< 10 2 |
Bactéries lactiques |
5.10 2 |
1,6.102 |
Absence dans 1 mL |
Levures |
<10 |
<10 |
Absence dans 0,1 mL |
Moisissures |
2,0.10 3 |
3,4.103 |
< 10 2 |
Coliformes |
<10 |
<10 |
Absence dans 1 mL |
4.4.3 Microfiltration
Compte tenu du diamètre de pores de la membrane utilisée (0,2 m), la filtration permetd’obtenir un perméat stérile. Dans les conditions testées, la densité de flux de perméat se stabilise après 30 min de filtration à 25 L/h.m². Ces performances, faibles par rapport à celles habituellement obtenues sur d’autres jus de fruit, sont probablement liées à la viscosité élevée du produit. Elles devraient néanmoins pouvoir être améliorées en optimisant les conditions de filtration (vitesse tangentielle, température) ou en y associant un traitement enzymatique. La composition en solutés du perméat n’est pas significativement différente de celle du nectar initial. La stérilité du perméat, qui est théoriquement garantie sur ce type de membrane, n’a pu être vérifiée suite à des problèmes de contamination des échantillons lors des prélèvements. L’évaluation sensorielle de nectars reconstitués à partir de perméat et de rétentat a montré que la couleur et le goût sucré du produit sont peu différents de ceux du nectar frais. Par contre, l’arôme et le caractère pulpeux semblent significativement atténués par le traitement.
5. CONCLUSION
La pulpe du fruit du baobab, caractérisée par son acidité, sa teneur en vitamine C, un taux de lipides et de protéines assez faible, donne aisément une boisson de type nectar. Certains constituants du fruit évoluent en fonction des zones de production et au cours du stockage. La stabilisation du produit par pasteurisation et microfiltration réduit la flore totale et prolonge de quelques jours la durée de conservation. Cependant des modifications organoleptiques sont constatées après traitement. Dans la perspective d’une transformation à plus grande échelle, des études complémentaires doivent être entreprises : étude de la matière première au cours du stockage, recherche d’un procédé de stabilisation du nectar affectant le moins possible sa qualité, et éventuellement réalisation d’un prétraitement enzymatique.
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